Amiante : Responsabilité des diagnostiqueurs immobiliers : la Cour de cassation réaffirme l’obligation du diagnostiqueur de se conformer aux normes et règles de l’art et précise l’étendu du préjudice indemnisable
Le 30 janvier 2025, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a rendu un arrêt rappelant les obligations des diagnostiqueurs immobiliers et les conséquences juridiques d’un rapport erroné (pourvoi n° 23-14.029).
Cette décision met en lumière la nécessité d’un respect strict des normes en vigueur, sous peine d’engager leur responsabilité civile professionnelle.
Dans cette affaire, Par acte authentique en date du 10 novembre 2014, M. [O] a acquis un bien immobilier. Conformément aux exigences légales, un diagnostic amiante a été réalisé préalablement à la vente par la société Yann Seguin expertise, assurée par la société Hiscox. Le rapport, établi le 29 août 2014, indiquait une présence limitée d’amiante.
Cependant, postérieurement à la transaction, une contre-expertise a révélé une présence bien plus étendue d’amiante dans l’immeuble et ses dépendances. Estimant que le diagnostic initial était erroné, M. [O] a engagé une action en responsabilité contre le diagnostiqueur et son assureur en vue d’obtenir une indemnisation correspondant au coût des travaux de désamiantage.
Par arrêt du 26 janvier 2023, la cour d’appel de Montpellier a reconnu la faute du diagnostiqueur pour n’avoir pas relevé plusieurs éléments visibles et accessibles contenant de l’amiante. Toutefois, elle a limité l’indemnisation à 40 000 euros, considérant que le préjudice de l’acquéreur se limitait à une « perte de chance de négocier une baisse du prix de vente », sans prendre en compte l’intégralité des frais de désamiantage évalués à 160 776,36 euros.
Position de la Cour de cassation
Saisie du litige, la Cour de cassation a annulé la décision d’appel en s’appuyant sur l’article 1240 du Code civil ainsi que les articles L. 271-4 du Code de la construction et de l’habitation et L. 1334-13 du Code de la santé publique.
Elle a rappelé que l’état des lieux annexé à un acte de vente doit garantir l’acquéreur contre le risque amiante et que la responsabilité du diagnostiqueur est engagée lorsque le diagnostic est erroné et non conforme aux normes techniques applicables :
- Il résulte des deux autres que l’état mentionnant la présence ou l’absence de matériaux ou produits contenant de l’amiante annexé à la promesse de vente ou à l’acte authentique de vente d’un immeuble garantit l’acquéreur contre le risque d’amiante et que la responsabilité du diagnostiqueur se trouve engagée lorsque le diagnostic n’a pas été réalisé conformément aux normes édictées et aux règles de l’art, et qu’il se révèle erroné (Ch. mixte, 8 juillet 2015, pourvoi n° 13-26.686, publié ; 3e Civ., 19 mai 2016, pourvoi n°15-12.408, publié).
- Pour limiter à la somme de 40 000 euros le montant des dommages-intérêts dus à l’acquéreur par suite du caractère erroné de l’état avant vente de présence de matériaux et produits amiantés dressé par le diagnostiqueur, l’arrêt énonce que la nécessité de désamianter l’immeuble n’est pas établie et qu’il y a lieu de réparer le préjudice allégué au titre de la perte de chance de négocier une baisse du prix d’achat de l’immeuble.
9. En statuant ainsi, après avoir relevé que le diagnostiqueur avait fautivement omis de signaler la présence d’amiante dans les toitures d’une dépendance, de la chaufferie, du garage, des combles 1 et 2 et la toiture de la buanderie et de la cuisine, la cour d’appel a violé les textes susvisés. »
En conséquence, elle a annulé l’arrêt de la cour d’appel de Montpellier, avec renvoi de l’affaire devant la cour d’appel de Nîmes.
Cet arrêt s’inscrit dans une jurisprudence constante visant à garantir la transparence des transactions immobilières et à protéger les acquéreurs contre les erreurs de diagnostic. Il rappelle l’importance pour les diagnostiqueurs de respecter scrupuleusement les normes en vigueur, sous peine d’engager leur responsabilité civile et de devoir indemniser intégralement le préjudice subi par l’acquéreur.
Ainsi, tout manquement à cette obligation de vigilance peut désormais exposer les diagnostiqueurs à des condamnations financières significatives, ce qui renforce la nécessité d’une exécution rigoureuse des missions d’expertise avant toute transaction immobilière.
Pour retrouver l’intégralité de la décision : https://www.courdecassation.fr/en/decision/679b2035b4b66853bd28e6cc?judilibre_juridiction=cc&nextdecisionindex=1&nextdecisionpage=1&op=Rechercher%20sur%20judilibre&page=1&previousdecisionindex=9&previousdecisionpage=0&search_api_fulltext=%22L%201221-9%22%20%22Code%20de%20la%20sant%C3%A9%20publique%22