Le principe de continuité du service public justifie le droit au renouvellement d’une convention d’occupation du domaine public.
CONSEIL D’ETAT, n° 395314, 25 janvier 2017, COMMUNE DE PORT-VENDRES
Dans cette affaire, le Conseil d’Etat a jugé que la décision de refus de renouvellement d’une convention d’occupation du domaine public était illégale, car elle portait atteinte au principe de continuité du service public.
En l’espèce, la convention d’occupation du domaine public de locaux occupés par l’association départementale des pupilles de l’enseignement public des Pyrénées-Orientales arrivait à son terme. La Commune, qui souhaitait disposer à nouveau de ses locaux, avait refusé de faire droit à la demande de renouvellement de l’association.
Le Conseil d’Etat juge que, malgré l’absence de droit acquis au renouvellement de l’occupant du domaine public, le rejet d’une demande de renouvellement ne peut intervenir que pour un motif d’intérêt général. Au cas particulier les actions de réinsertion de l’association exigeaient la proximité de la mer et de surcroit la Commune ne faisait pas état d’un projet d’intérêt général qui pouvait justifier la non-reconduction de la convention d’occupation de l’immeuble.
Elle confirme donc l’arrêt de la Cour Administrative d’Appel de Marseille censurant la décision de la Commune de PORT-VENDRES
La juridiction administrative fait donc primer la continuité du service public et l’affectation du domaine public à un service public au principe de libre disposition de son domaine public par la Commune et plus largement au principe de libre administration des collectivités territoriales.
En effet, le non-renouvellement était justifié par la volonté de la Commune de ne plus accueillir des jeunes placés par la protection judiciaire de la jeunesse. La Commune, pour justifier la légalité du non-renouvellement, avançait que ces derniers auraient commis des délits au sein de la Commune et nuirait à la tranquillité de la station balnéaire.
S’il ne s’agit pas ici de commenter la volonté de la Commune et les motifs qui justifiaient sa décision, on constate qu’une décision de l’Etat concernant directement la Commune s’impose à cette dernière.
Jérôme OLIVIER
Avocat
Extraits :
« 3. En deuxième lieu, la cour a relevé, d’une part, que l’association départementale des pupilles de l’enseignement public des Pyrénées-Orientales, gestionnaire du centre éducatif de Port-Vendres, participait au service public de la protection judiciaire de la jeunesse relevant de la compétence de l’Etat, d’autre part, que l’immeuble avait été affecté à ce service public par une convention dont la signature avait été approuvée par le conseil municipal de la commune de Port-Vendres et qu’il avait été spécialement aménagé à cette fin, notamment par l’aménagement d’un espace pour le veilleur de nuit dans les dortoirs, la réalisation d’un économat fermant à clef et la mise en place d’un système de fermeture à clef des dortoirs. Elle en a déduit que l’immeuble litigieux relevait, conformément aux conditions applicables avant l’entrée en vigueur du code général de la propriété des personnes publiques, du domaine public de la commune. En statuant ainsi, la cour n’a, contrairement à ce que soutient la commune, commis aucune erreur de droit.
- En troisième lieu, s’il résulte des principes généraux de la domanialité publique que les titulaires d’autorisations ou de conventions d’occupation temporaire du domaine public n’ont pas de droit acquis au renouvellement de leur titre, il appartient au gestionnaire du domaine d’examiner chaque demande de renouvellement en appréciant les garanties qu’elle présente pour la meilleure utilisation possible du domaine public. Il peut décider, sous le contrôle du juge, de rejeter une telle demande pour un motif d’intérêt général. Pour déterminer si un tel motif existe, il y a lieu, de tenir compte, le cas échéant, parmi l’ensemble des éléments d’appréciation, des contraintes particulières qui pèsent sur l’activité de l’occupant, notamment de celles qui peuvent résulter du principe de continuité du service public.
- La cour a relevé que la commune n’avait jamais fait état d’un projet d’intérêt général pour la réalisation duquel elle aurait eu besoin de l’immeuble en cause. Il ressort par ailleurs des énonciations de son arrêt, non arguées de dénaturation, que si la commune faisait mention d’incidents provoqués par certains des mineurs accueillis ou de délits commis par eux, ces faits se sont produits principalement à l’intérieur de l’immeuble, sans qu’il soit par ailleurs établi ni même allégué qu’ils auraient eu pour effet de dégrader l’immeuble ou de porter atteinte à sa valeur. La cour a enfin relevé que, pour l’exercice de sa mission de service public, l’association occupante mettait en œuvre des actions de réinsertion qui exigeaient son installation dans un immeuble situé à proximité immédiate de la mer. En déduisant de l’ensemble de ces éléments que le refus de renouvellement en litige n’était pas justifié, dans les circonstances de l’espèce qui lui était soumise, par un motif d’intérêt général suffisant, la cour n’a pas commis d’erreur de droit et n’a entaché son arrêt d’aucune erreur de qualification juridique des faits.»