Interprétation favorable des exceptions à la règle de constructibilité limitée en l’absence de PLU par le Conseil d’État.
Conseil d’État, n° 419921 du 14 avril 2019
En l’absence de documents d’urbanisme local, l’article L.111–4 1° du Code de l’Urbanisme (anciennement article L.111–1‑2 1°du même Code) prévoit deux exceptions à la règle de constructibilité limitée.
Peut ainsi être autorisé un projet relatif à :
- L’adaptation, le changement de destination, la réfection, l’extension des constructions existantes ;
- La construction de bâtiments nouveaux à usage d’habitation à l’intérieur du périmètre regroupant les bâtiments d’une ancienne exploitation agricole, dans le respect des traditions architecturales locales.
Le Conseil d’État vient préciser, de façon assez favorable, le recours à ces deux exceptions :
- Pour la première, la Haute Juridiction énonce que peuvent être autorisés des projets «eu égard à leur implantation par rapport aux constructions existantes et à leur ampleur limitée en proportion de ces constructions».
Cependant, elle indique que rien n’impose que ces projets aient un caractère mesuré.
Le Conseil d’État censure ainsi la Cour Administrative d’Appel de Nantes qui avait recours à ce critère non prévu par les textes.
C’est donc uniquement en comparaison avec les constructions existantes que l’ampleur de bâtiments s’apprécie et non de manière objective.
De plus, la Haute Juridiction précise que ces projets n’ont pas à respecter les conditions tenant au respect des traditions architecturales locales, cette condition étant seule applicable aux nouvelles constructions au sein d’un bâti existant.
- Pour la seconde exception, le périmètre des bâtiments agricoles au sein duquel la nouvelle construction doit s’insérer n’a pas à être nécessairement clos, mais peut être « un espace entouré de bâtiments agricoles suffisamment rapprochés pour pouvoir être regardés comme délimitant, même sans clôture ou fermeture, un périmètre regroupant les bâtiments d’une ancienne exploitation agricole. »
Ces deux interprétations paraissent en conséquence favorables à la construction de nouveaux projets en milieu rural en l’absence de PLU.
Maître Jérôme OLIVIER
Avocat au Barreau d’ANNECY
Extraits :
- Conseil d’État, n° 419921 du 14 avril 2019 :
«4. A cet égard, le 1° du I de l’article L. 111–1‑2 prévoit deux exceptions que sont, d’une part, l’adaptation, le changement de destination, la réfection et l’extension des constructions existantes et, d’autre part, depuis la modification apportée par la loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion, la construction de bâtiments nouveaux à usage d’habitation à l’intérieur du périmètre regroupant les bâtiments d’une ancienne exploitation agricole et dans le respect des traditions architecturales locales.
- Au titre de la première de ces deux exceptions, peuvent être autorisés des projets qui, eu égard à leur implantation par rapport aux constructions existantes et à leur ampleur limitée en proportion de ces constructions, peuvent être regardés comme ne procédant qu’à l’extension de ces constructions. Aucune disposition n’impose toutefois qu’une extension satisfaisant à ces critères doive en outre, pour pouvoir être autorisée au titre du 1° du I de l’article L. 111–1‑2, présenter un caractère ” mesuré “. Il résulte, enfin, de cet article, éclairé par les travaux parlementaires ayant conduit à l’adoption de la loi du 25 mars 2009, que la condition tendant au respect des traditions architecturales locales, résultant de cette loi, ne s’applique pas à l’extension des constructions existantes, mais seulement à la construction de bâtiments nouveaux.
- Au titre de la seconde exception, peut être autorisée la construction de bâtiments nouveaux à usage d’habitation, à la double condition qu’ils soient implantés à l’intérieur d’un périmètre regroupant les bâtiments d’une ancienne exploitation agricole et qu’ils respectent les traditions architecturales locales. Le bénéfice de cette exception n’est pas réservé aux cas dans lesquels le périmètre constitué par les bâtiments d’une ancienne exploitation agricole est clos, mais peut aussi valoir pour les cas où les bâtiments nouveaux sont implantés dans un espace entouré de bâtiments agricoles suffisamment rapprochés pour pouvoir être regardés comme délimitant, même sans clôture ou fermeture, un périmètre regroupant les bâtiments d’une ancienne exploitation agricole.
- En l’espèce, pour confirmer l’annulation pour excès de pouvoir de l’arrêté par lequel le préfet de l’Orne avait refusé de délivrer un permis de construire à M. D et MmeC, la cour administrative d’appel de Nantes a, d’une part, jugé que le préfet, en imposant que l’extension d’une construction existante, pour pouvoir être autorisée sur le fondement des dispositions précitées du 1° du I de l’article L. 111–1‑2 du code de l’urbanisme, devait présenter un caractère mesuré, avait opposé une condition non prévue par la loi. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que la cour, en statuant ainsi, n’a pas commis d’erreur de droit.
- La cour administrative d’appel a, d’autre part, jugé que le projet de construction, s’il devait être regardé comme une construction nouvelle, était situé à l’intérieur du périmètre regroupant les bâtiments d’une ancienne exploitation agricole. En statuant ainsi, alors même que l’espace délimité par les constructions agricoles rapprochées qu’elle a prises en compte n’était pas clos, la cour s’est livrée, sans erreur de droit et en motivant suffisamment son arrêt sur ce point, à une appréciation souveraine des faits de l’espèce qui est exempte de dénaturation. La cour s’étant bornée à relever que le projet se situait au sein d’un tel périmètre pour juger que le préfet n’aurait pu légalement le refuser au motif qu’il constituerait une construction nouvelle et non une extension d’une construction existante, le ministre ne peut utilement soutenir qu’elle aurait commis une erreur de droit en ne recherchant pas si le projet satisfaisait, en outre, à l’ensemble des conditions auxquelles sont subordonnées les constructions de bâtiments nouveaux à usage d’habitation sur le fondement de l’article L. 111–1‑2 du code de l’urbanisme.»
A consulter en intégralité sur le site légiFrance : https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?oldAction=rechJuriAdmin&idTexte=CETATEXT000038530390&fastReqId=365727635&fastPos=1